Line drawing of a man from the shoulders up wearing a wide brimmed hat. Lines are made of cursive French.

Winner of the Academy of American Poet Prize (University and College Poetry Prizes)

Dans les tranchées du langage

A-t-elle des yeux, la langue, pour voir ce qu’elle cache dans ses mots ?

ces espaces

aussi imperceptibles que ceux entre les dents qui lui permettent de parler,

de devenir un langage

Ou, a-t-il des mains, ce langage,

des doigts de chair pour tâter le grain des tranchées

qui s’y cachent ?

Creuse-t-il la terre de ces tranchées avec ces mains pour enfouir les sens évidents et 

ceux qui s’annoncent au-delà des mots semés

afin de cultiver des mangroves de discours

verdoyantes, resplendissantes en présence du soleil-lecteur qui

ne voit rien que les feuilles remplies de sens évidents

Celui qui parle voit clairement ses tranchées et l’ordre de ses plantes

celui qui parle les a dirigées sachant couvrir

ce qui ne doit pas se dire

disant ainsi

en ne disant pas toujours exactement

ceci n’est pas une pipe

mais ici, l’image vaut autant que la chose

Dire sans le savoir c’est toujours dire ; c’est dit

donc faites attention au langage, aux sens semés.

Alors voit-elle cette langue ce qu’elle cache quand elle devient 

à la fois

celle qui parle et qui est parlée ?

celle qui dirige et qui est dirigée ?

II

Il nous faut donc nous rappeler que nous avons créé le langage

que ses secrets sont les nôtres

que ses sujets sous-jacents le sont aussi

Encore, c’est nous qui cachons des choses

ces « choses », des référents aussi vagues que nos mots

derrière lesquelles se trouvent les vraies idées, les préjugés portés n’importe où 

sans aveux: les haines cachées et systémiques 

qui nous dévorent 

cœur et corps,

Vous et moi, de tous les pays occidentaux—

ces stratégies sont verdoyantes, resplendissantes en présence de 

nous les lecteurs qui ne voyons que— 

qui ne voulons voir que

les sens évidents

Nous devons creuser dans notre langage et désherber ce jardin

car il est toujours notre jardin à nous

c’est toujours notre travail à nous de le rendre aussi rempli de belles fleurs, verdoyantes

et resplendissantes,

que possible

que le monde y soit accueilli

Nous devons toujours comprendre ce que veulent dire nos mots

ce qu’ils disent de nos cœurs

Ceci est bien une pipe, 

et c’est aussi un devoir—le nôtre.

In Language’s Trenches

Does a language, a tongue, have eyes to see what it hides in its words?

those spaces

as imperceptible as the ones between the teeth that allow it speech

Or does a language have hands,

fingers of flesh to feel out the grain of the trenches

that hide themselves there?

Does it dig with these hands at the earth of these trenches to bury the obvious meanings and

those that speak up far beyond the seeded words

to grow mangroves of discourse

verdant, resplendent in the presence of the reader-sun who 

sees nothing but leaves full of obvious meanings

The one who speaks sees clearly the trenches and the order of their plants

the one who speaks has directed them, knowing to cover

that which should not be said

thus saying

in not ever exactly saying

this is not a pipe

but here, the image is worth as much as the thing

To say without knowing is still to say; it’s said

so choose words, diction, with care.

So does a tongue see what it hides when it becomes at once

speaker and spoken?

director and directed?

II

We have to remember: we created language

its secrets are ours

its subtext our own

Still, we are the hiders of things—

“things” a referent as vague as our words

behind which are the true ideas, the prejudices carried around without confession: the hidden, systemic hates

that devour us

heart and body

You and I, of all Western countries

these strategies are verdant, resplendent in our presence

the readers who see only—

want to see only

the obvious meanings

We must dig into our language and weed this garden

because it is still our very own

it is still our work alone to make it as full of beautiful flowers, verdant

and resplendent,

as possible

may the world be welcomed here within.

We must understand always what our words say,

what they say of our hearts

This is indeed a pipe, 

and it is a duty—and it is ours.